samedi 4 octobre 2008

Alain Mille : suivre nos traces

Alain Mille, responsable de l’équipe Silex du Laboratoire d’informatique en image et système d’information de Lyon, s’intéresse aux traces modélisés, c’est-à-dire, plus particulièrement, aux traces que l’on utilise par devers soi pour monitorer son expérience, dans un environnement de travail surtout. Les traces informatiques sont des éléments laissés dans l’environnement à la suite d’une activité. Ces traces peuvent être laissées volontairement ou non et peuvent être considérées comme des "indices" d’activité par des "observateurs avertis".
De point de vue informatique, une trace est une séquence d’éléments laissés dans l’environnement informatique par l’environnement lui-même ou par l’utilisateur de l’environnement (il faut un environnement logiciel pour garder trace). Cela peut-être des évènements, des actions, des annotations... associés à des objets informatiques localisés dans le temps et l’espace.

Un environnement informatique c’est n’est pas qu’un poste de travail. L’environnement dépend du feedback qu’il renvoit et des interractions qu’il propose. L’environnement potentiellement accessible est plus vaste (via le réseau) et peut-être accessible dans les deux sens. Tous les éléments qui peuvent être dans une trace viennent de tout cet environnement.
Les traces d’interaction, c’est ce qu’on décide de garder de l’interaction au cours de l’activité de chacun. On peut conserver les traces dans des bases de traces. Les traces se découpent en signatures d’épisodes, c’est-à-dire des épisodes qui ont une signification par rapport à l’activité. On ne sait pas comment quelqu’un va s’approprier un réseau informatique pour le manipuler : il faut offrir des services qui rendent intelligibles, lisibles ces traces. Il faut pouvoir transformer quelque chose qui ne relève pas du langage en langage justement, alors qu’on ne peut pas prévoir à l’avance l’usage qui en est fait. Ces signatures d’épisodes permettent de retrouver des séquences de sens. La sémantique de l’épisode se construit lors de l’interaction de l’usager.

La trace apparaît au fur et à mesure que les gens travaillent et peut être relativement détaillée. La manière de représenter une trace d’activité d’utilisateur est aujourd’hui une question en soit. Les gens se voient en train de travailler. Cette trace est bien souvent intelligible facilement. Une trace par exemple, peut-être documentarisée : les gens peuvent la couper et permettre à quelqu’un de la rejouer.

L’activité est l’objet de la trace. L’activité est médiée par l’environnement informatique. La trace est volontaire et attendue. Si on veut qu’elle ait un sens, il faut qu’elle soit appropriée par celui qui la fabrique. Il faut que l’usager compte sur elle pour pouvoir en faire quelque chose, la partager, la publier... "Je crois qu’il faut avertir les gens qu’ils sont tracés", insite Alain Mille.

La trace est un objet informatique, ce qui signifit que c’est un objet sur lequel on peut calculer, que c’est un support à la coconstruction de connaissance, un modèle "plastique" et évolutif.

Un modèle de trace est un ensemble d’observés typés et de relations entre observés qui s’instancient dans la trace, avec une spécification de la temporalité et de la spatialité des observés.

Pour différencier la trace de la trace informatique, Alain Mille parle de "M-Trace", car en en-tête de la trace, il y a son modèle : chaque trace individuelle a son propre modèle associé sur lequel on peut agir pour donner une autre vision de cette même trace. Les systèmes à base de traces ont besoin de sources de traçages (enregistrement d’action, capture de messages de communication, inscription d’observations, ...). Le résultat de ces collectes sont les M-traces (les traces et leurs modèles), depuis lesquelles on peut faire des transformations : reformulation, filtrage, visualisation... Et interagir à nouveau, pour y faire des requêtes, etc.

Pour Alain Mille, ces traces peuvent donner naissance à un moteur d’assitance. Le laboratoire Silex a lancé ainsi une plateforme éducative, avec e-lycée, permettant à de jeunes apprenant d’avoir accès à toutes leurs traces d’apprentissage à distance. Bien d’autres usages de ce type de traces sont possibles : l’apprentissage bien sûr, et l’appropriation (car j’ai un feedback sur mon activité). On peut co-construire des communautés pour s’approprier des activités communes : on peut faire émerger de bonnes pratiques et les partager. On peut imaginer également des assistances à la réalisation d’activités évolutives, à la gestion de connaissances (partage, réutilisation, découverte...) et à l’intégration.

Bien sûr, ces systèmes ont aussi une face noire : on peut utiliser les traces pour faire du contrôle d’individuation, les utiliser pour conditionner les bonnes pratiques, pour découvrir des comportements.... Pour assurer une certaine sécurité, outre le crytpage, il faut vraiment rendre visible la collecte.

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