L'ethnologue australienne Genevieve Bell, chercheuse chez Intel s'est intéressée à nos pratiques du mensonge et du secret. On ment tout le temps a souligné la chercheuse, en puisant ses références dans de multiples recherches : 45 % des utilisateurs de mobiles au Royaume-Uni admettent mentir par SMS. Les gens mentent sur leur taille et leur poid. Les hommes ont plus tendance à dire des mensonges que les femmes (20 % de plus en moyenne) et nous ne mentons pas sur les mêmes choses : les hommes plutôt sur leur travail ou leurs occupations, les femmes plutôt sur leur poids, leur âge, leur état marital ou leurs courses. Nous disons entre 6 et 2000 mensonges par jours en moyenne estiment certains chercheurs. 40 % de nos mensonges concernent nos « mauvais comportements ».
Culturellement, le fait de dire des mensonges est souvent un comportement répréhensible. Garder ou dire des secrets est plus ambigu. Il existe dans nos idéaux culturels, dans l'histoire de nos pratiques sociales des prescriptions et des proscriptions, des comportements autorisés et d'autres « interdits ».
Le mensonge est nécessaire pour survivre dans notre vie quotidienne nous apprennent les psychologues comme Peter Steghtz ou les anthropologues comme Volker Sommer. Certains estiment même que le mensonge est une forme de jeu social. Dissimuler de l'information est souvent un moyen de se protéger.
L'idée que les informations doivent être également disponibles pour tous est un concept plutôt neuf.
Or la technologie évolue plus vite que nos pratiques sociales. Les nouvelles technos débarquent donc dans ce territoire de secrets et de mensonges déjà balisé par nos pratiques. Avec les nouvelles technologies, les mensonges sur notre localisation, nos intentions, notre identité sont toujours possibles. MySpace par exemple interdit l'accès à sa plateforme aux moins de 13 ans... et on constate un nombre anormalement élevé d'utilisateurs de plus de 100 ans !
La question est de savoir si les nouvelles technologies facilitent les moyens que nous avons de mentir ? En ligne, nos culpabilités, nos peurs, nos hontes sont largement absentes. Or, des sites pour partager des secrets anonymement comme PostSecret sont très populaire, aussi surprenant que cela puisse paraître. Les sites sociaux élèvent au niveau d'art la fabulation sur nos identités réelles ou imaginaires. En même temps les systèmes pour tromper nos tracages, les services d'alibi pour se créer de fausses histoires, de faux rendez-vous émergent également.
En ligne, la tension entre les pratiques et les idéaux culturels que nous partageons persiste autour des notions de mensonge et des secrets. Si les nouvelles technos ont un réel potentiel pour révéler les vérités, il faut nous interroger sur comment les secrets et les mensonges peuvent nous apporter de nouvelles manières pour penser l'intimité et la sécurité. Comment cela doit interroger nos discours sur la sécurité nationale, le danger, la safety. Nos mondes numériques ont assurément besoin de zones de secrets et de mensonges.
Genevieve Bell a terminé cette stimulante présentation d'un exemple éclairant : une image de panneau de circulation en angleterre qui indique aux automobilistes de ne pas suivre les indications délivrées par leur système GPS, car celui-ci comporte une erreur qui a provoqué de nombreux accidents (l'histoire racontée par la BBC pour ceux qui ne la connaissent pas).
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